(XVIII)
Quatorzième journée
On s'aperçut ce jour-là que le temps venait favoriser encore les
projets infâmes de nos libertins et les soustraire mieux que leur
précaution même aux yeux de l'univers entier. Il était
tombé une quantité effroyable de neige qui, remplissant le vallon
d'alentour, semblait interdire la retraite de nos quatre
scélérats aux approches même des bêtes; car, pour des
humains, il n'en pouvait plus exister un seul qui pût oser arriver
jusqu'à eux. On n'imagine pas comme la volupté est servie par ces
sûretés-là et ce que l'on entreprend quand on peut se dire:
"Je suis seul ici, j'y suis au bout du monde, soustrait à tous les yeux
et sans qu'il puisse devenir possible à aucune créature d'arriver
à moi; plus de freins, plus de barrières." De ce
moment-là, les désirs s'élancent avec une
impétuosité qui ne connaît plus de bornes, et
l'impunité qui les favorise en accroît bien délicieusement
toute l'ivresse. On n'a plus là que Dieu et la conscience: or, de quelle
force peut être le premier frein aux yeux d'un athée de coeur et
de réflexion? Et quel empire peut avoir la conscience sur celui qui
s'est si bien accoutumé à vaincre ses remords qu'ils deviennent
pour lui presque des jouissances? Malheureux troupeau, livré à la
dent meurtrière de tels scélérats, que vous eussiez
frémi si l'expérience qui vous manquait vous eût permis
l'usage de ces réflexions! Ce jour était celui de la fête
de la seconde semaine; on ne s'occupa qu'à la célébrer. Le
mariage qui devait se faire était celui de Narcisse et
d'Hébé, mais ce qu'il y avait de cruel, c'est que les deux
époux étaient tous deux dans le cas d'être corrigés
le même soir. Ainsi, du sein des plaisirs de l'hymen, il fallait passer
aux amertumes de l'école; quel chagrin! Le petit Narcisse, qui avait de
l'esprit, le remarqua, et on n'en procéda pas moins aux
cérémonies ordinaires. L'évêque officia, on
conjoignit les deux époux et on leur permit de se faire, l'un devant
l'autre et aux yeux de tout le monde, tout ce qu'ils voudraient. Mais qui le
croirait? L'ordre était déjà trop étendu, et le
petit bonhomme, qui s'instruisait fort bien, très enchanté de la
tournure de sa petite femme et ne pouvant pas venir à bout de lui
mettre, allait pourtant la dépuceler avec ses doigts si on l'eût
laissé faire. On s'y opposa à temps, et le duc, s'en emparant, la
foutit en cuisses sur-le-champ, pendant que l'évêque en faisait
autant à l'époux. On dîna, ils furent admis au festin, et
comme on les fit prodigieusement manger, tous deux, en sortant de table,
satisfirent en chiant, l'un Durcet, l'autre Curval, qui gobèrent
délicieusement ces petites digestions enfantines. Le café fut
servi par Augustine, Fanny, Céladon et Zéphire. Le duc ordonna
à Augustine de branler Zéphire et à celui-ci de lui chier
dans la bouche en même temps qu'il déchargerait.
L'opération réussit à merveille, et si bien que
l'évêque voulut en faire faire autant à Céladon:
Fanny le branla, et le petit bonhomme eut ordre de chier dans la bouche de
monseigneur en même temps qu'il sentirait son foutre couler. Mais il n'y
eut pas de ce côté un succès aussi brillant que de l'autre;
l'enfant ne put jamais chier en même temps qu'il déchargeait, et
comme ceci n'était qu'une épreuve et que les règlements
n'ordonnaient rien sur cela, on ne lui infligea aucune punition. Durcet fit
chier Augustine, et l'évêque, qui bandait ferme, se fit sucer par
Fanny pendant qu'elle lui chiait dans la bouche; il déchargea et, comme
sa crise avait été violente, il brutalisa un peu Fanny et ne put
malheureusement point la faire punir, quelque envie qu'il paraissait bien qu'il
en eût. Il n'y avait rien de si taquin que l'évêque.
Sitôt qu'il avait déchargé, il aurait volontiers voulu voir
au diable l'objet de sa jouissance; on le savait, et il n'y avait rien que les
jeunes filles, les épouses et les jeunes garçons craignissent
autant que de lui faire perdre du foutre. Après la méridienne, on
passa au salon où chacun ayant pris place, Duclos reprit ainsi le fil de
sa narration:
"J'allais quelquefois faire des parties en ville, et comme elles
étaient communément plus lucratives, la Fournier tâchait de
se procurer de celles-là le plus qu'elle pouvait. Elle m'envoya un jour
chez un vieux chevalier de Malte, qui m'ouvrit une espèce d'armoire
toute remplie de cases ayant chacune un vase de porcelaine dans lequel
était un étron. Ce vieux débauché était
arrangé avec une de ses soeurs qui était abbesse d'un des plus
considérables couvents de Paris. Cette bonne fille, à sa
sollicitation, lui envoyait tous les matins des caisses pleines des
étrons de ses plus jolies pensionnaires. Il rangeait tout cela par
ordre, et quand j'arrivai il m'ordonna de prendre un tel numéro qu'il
m'indiqua et qui était le plus ancien. Je le lui présentai. "Ah!
dit-il, c'est celui d'une fille de seize ans belle comme le jour. Branle-moi
pendant que je vais la manger." Toute la cérémonie consistait
à le secouer et à lui présenter les fesses pendant qu'il
dévorait, puis à mettre sur le même plat mon étron
à la place de celui qu'il venait de gober. Il me regardait faire, me
torchait le cul avec sa langue et déchargeait en me suçant
l'anus. Ensuite, les tiroirs se refermaient, j'étais payée, et
notre homme, à qui je rendais cette visite d'assez bon matin, se
rendormait comme si de rien n'était.
"Un autre, selon moi plus extraordinaire (c'était un vieux moine),
entre, demande huit ou dix étrons des premiers venus, filles ou
garçons, ça lui est égal. Il les mêle, les
pétrit, mord au milieu et décharge en en dévorant au moins
la moitié pendant que je le suce.
"Un troisième, et c'est celui de tous qui sans doute m'a donné
le plus de dégoût dans ma vie. Il m'ordonne d'ouvrir bien la
bouche. J'étais nue, couchée à terre sur un matelas, et
lui à califourchon sur moi; il me dépose son cas dans le gosier,
et le vilain revient le manger dans ma bouche en m'arrosant les tétons
de foutre."
"Ah, ah! il est plaisant, celui-là, dit Curval; parbleu, j'ai
précisément envie de chier, il faut que je l'essaie. Qui
prendrai-je, monsieur le duc? -Qui? reprit Blangis; ma foi, je vous conseille
Julie, ma fille; elle est là, sous votre main, vous aimez sa bouche,
servez-vous-en. -Merci du conseil, dit Julie en rechignant; que vous ai-je fait
pour dire de telles choses contre moi? -Et! puisque cela la fâche, dit le
duc, et que c'est une assez bonne fille, prenez mademoiselle Sophie; c'est
frais, c'est joli, ça n'a que quatorze ans. -Allons soit; va pour
Sophie, dit Curval dont le vit turbulent commençait à
gesticuler." Fanchon approche la victime; le coeur le cette pauvre petite
misérable se soulève d'avance. Curval en rit, il approche son
gros vilain et sale fessier de ce petit visage charmant et nous donne
l'idée d'un crapaud qui va flétrir une rose. On le branle, la
bombe part. Sophie n'en perd pas une miette, et le crapuleux vient repomper ce
qu'il a rendu et avale tout en quatre bouchées, pendant qu'on le secoue
sur le ventre de la pauvre petite infortunée qui, l'opération
faite, vomit tripes et boyaux, au nez de Durcet qui vint le recevoir avec
emphase et qui se branla en s'en faisant couvrir. "Allons, Duclos, continue,
dit Curval, et réjouis-toi de l'effet de tes discours; tu vois comme ils
opèrent." Alors Duclos se reprit dans ces termes, tout enchantée
au fond de l'âme de réussir aussi bien dans ses récits:
"L'homme que je vis après celui dont l'exemple vient de vous
séduire, dit Duclos, voulait absolument que la femme qui lui fut
présentée eût une indigestion. En conséquence, la
Fournier, qui ne m'avait prévenue de rien, me fit avaler à
dîner une certaine drogue qui ramollit ma digestion et la rendit fluide,
comme si ma selle fût devenue la suite d'une médecine. Notre homme
arrive, et après quelques baisers préliminaires à l'objet
de son culte, dont je ne pouvais souffrir le retardement à cause des
coliques dont je commençais à être tourmentée, il me
laisse libre d'opérer. L'injection part, je tenais son vit, il se
pâme, il avale tout, m'en redemande encore; je lui fournis une seconde
bordée, bientôt suivie d'une troisième, et l'anchois
libertin laisse enfin dans mes doigts des preuves non équivoques de la
sensation qu'il a reçue.
"Le lendemain, j'expédiai un personnage dont la manie baroque aura
peut-être quelques sectateurs parmi vous, messieurs. On le plaça
d'abord dans la chambre à côté de celle où nous
avions coutume d'opérer et dans laquelle était ce trou si commode
aux observations. Il s'y arrange seul. Un autre acteur m'attendait dans la
chambre voisine: c'était un cocher de fiacre qu'on avait envoyé
prendre au hasard et qu'on avait prévenu de tout. Comme je
l'étais également, nos personnages furent bien remplis. Il
s'agissait de faire chier le phaéton positivement en face du trou, afin
que le libertin caché ne perdît rien de l'opération. Je
reçois l'étron dans un plat, j'aide bien à ce qu'il soit
déposé tout entier, j'écarte les fesses, je presse l'anus,
rien n'est oublié par moi de tout ce qui peut faire chier
commodément. Dès que mon homme a fait, je lui saisis le vit et le
fais décharger sur sa merde, et tout cela toujours bien en perspective
de notre observateur. Enfin, le paquet prêt je vole à l'autre
chambre. "Tenez, gobez vite monsieur, m'écriai-je, il est tout chaud!"
Il ne se le fait pas répéter; il saisit le plat, m'offre son vit
que je branle, et le coquin avale tout ce que je lui présente, pendant
que son foutre exhale sous les mouvements élastiques de ma main
diligente."
"Et quel âge avait le cocher? dit Curval. -Trente ans à peu
près, dit Duclos. -Oh! ce n'est rien que cela, répondit Curval.
Durcet vous dira quand vous voudrez que nous avons connu un homme qui faisait
la même chose, et positivement avec les mêmes circonstances, mais
avec un homme de soixante à soixante-dix ans qu'il fallait prendre dans
tout ce que la lie du peuple a de plus crapuleux. -Mais il n'est joli que comme
cela, dit Durcet dont le petit engin commençait à lever le nez
depuis l'aspersion de Sophie; je parie, quand on voudra, le faire avec le doyen
des invalides. -Vous bandez, Durcet, dit le duc, je vous connais: quand vous
commencez à devenir sale, c'est que votre petit foutre bouillonne.
Tenez! Je ne suis pas le doyen des invalides, mais pour satisfaire votre
intempérance je vous offre ce que j'ai dans les entrailles et je crois
que cela sera copieux. -Oh, ventredieu! dit Durcet, c'est une bonne fortune que
cela, mon cher duc. Le duc acteur se rapprochant, Durcet s'agenouille au bas
des fesses qui vont le combler d'aise; le duc pousse, le financier avale, et le
libertin, que cet excès de crapule transporte, décharge en jurant
qu'il n'eut jamais tant de plaisir. "Duclos, dit le duc, viens me rendre ce que
j'ai fait à Durcet. -Monseigneur, répondit notre historienne,
vous savez que je l'ai fait, ce matin, et que vous l'avez même
avalé. -Ah! c'est vrai, c'est vrai, dit le duc. Eh bien! Martaine, il
faut donc que j'aie recours à toi, car je ne veux pas d'un cul d'enfant:
je sens que mon foutre veut partir, et pourtant qu'il ne se rendra qu'avec
peine, moyen en quoi je veux du singulier." Mais Martaine était dans le
cas de Duclos; Curval l'avait fait chier le matin. "Comment, double dieu! dit
le duc, je ne trouverai donc pas un étron ce soir?" Et alors
Thérèse s'avança et vint offrir le cul le plus sale, le
plus large et le plus puant qu'il fût possible de voir. "Ah! passe pour
cela, dit le duc en se postant, et si dans le désordre où je suis
cet infâme cul-là ne fait pas son effet, je ne sais plus à
quoi il faudra que j'aie recours!" Thérèse pousse, le duc
reçoit; l'encens était aussi affreux que le temple dont il
exhalait, mais quand on bande comme bandait le duc, ce n'est jamais de
l'excès de la saleté qu'on se plaint. Ivre de volupté, le
scélérat avale tout et fait sauter au nez de Duclos qui le branle
les preuves les plus incontestables de sa mâle vigueur. On se mit
à table, les orgies furent consacrées aux pénitences. Il y
avait cette semaine-là sept délinquants: Zelmire, Colombe,
Hébé, Adonis, Adélaïde, Sophie et Narcisse. La tendre
Adélaïde ne fut pas ménagée. Zelmire et Sophie
rapportèrent aussi quelques marques des traitements qu'elles avaient
éprouvés, et sans plus de détails, puisque les
circonstances ne nous le permettent pas encore, chacun fut se coucher et
prendre dans les bras de Morphée les forces nécessaires à
resacrifier de nouveau à Vénus.